lundi 6 février 2017

TEXTO DU JOUR : ALERTE N°27 du 6 février 2017 : Ces leaders Africains qui meurent hors du Continent : Pourquoi ?


Parmi les risques de crises et de conflits en Afrique, l’obsolescence du système sanitaire, les causes politiques et l’injustice provoquent très souvent la colère d’une partie de l’opinion.  Les choses se compliquent lorsqu’une simple maladie d'origine inconnue, comme celui qui se manifeste en ce moment sur l'île de Sao Tomé où 1.094 cas ont été enregistrés pour une population de moins de 200.000 habitants à cause d’un violent ulcère cutané, sème l'inquiétude. La situation est d’autant plus préoccupante que les autorités ont demandé le soutien de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) qui vient de dépêcher un spécialiste béninois de l'ulcère de Buruli.
Et les décès hors du pays, de plusieurs leaders Africains en est une autre preuve éclatante. On recense ainsi une liste de chefs d’Etat du continent qui se soignent dans les hôpitaux européens qu’ils considèrent comme meilleurs. Ceci constituant un véritable aveu d’échec, et un témoignage que leurs propres systèmes de santé nationaux ne sont pas performants.
La liste des chefs d’Etat africains qui délaissent les hôpitaux de leur pays pour aller se soigner en Occident est longue.  Sans être exhaustif, on peut citer, le président malien Ibrahim Boubacar Keita qui a été opéré d’une « tumeur bénigne » à l’Hôpital militaire Bégin, à Saint-Mandé (Val-de-Marne), en région parisienne, et son homologue ivoirien Alassane Ouattara qui s’était fait opérer en 2014 à l’Hôpital américain de Neuilly, à l’instar du Gabonais Ali Bongo Ondimba qui avait choisi, quelques années plus tôt, la clinique chic de l’Ouest parisien pour y subir une intervention chirurgicale. Le Camerounais Paul Biya, lui, se soigne à Genève où il réside une partie de l’année. Son dossier médical est aux mains de médecins suisses, tandis que son épouse, Chantal, préfère les hôpitaux parisiens. Il en est de même des chefs d’Etat maghrébins dont l’Algérien Abdelaziz Bouteflika qui a longuement séjourné en 2013 à l’Hôpital militaire du Val-de-Grâce, puis à l’Hôtel national des Invalides pour sa rééducation. Il a effectué aussi en décembre 2015 à la Clinique d’Alembert, à Grenoble, un contrôle médical.
Le plus surprenant, c’est le roi Mohamed VI qui est venu en France en 2013 pour y subir une opération chirurgicale alors que son pays reste une destination sanitaire privilégiée pour de nombreux chefs d’Etat d’Afrique subsaharienne.
En délaissant les institutions sanitaires de leurs pays pour se soigner à l’étranger, les autorités commettent une faute ; et c’est la preuve irréfutable qu’ils n’ont pas réussi à bâtir sur place dans leurs pays, un système de santé digne de leur confiance.
Si, dès qu’ils sont malades, même légèrement, les présidents africains sautent dans l’avion pour Paris, Londres, Lisbonne ou Madrid afin d’y recevoir des soins, c’est aussi parce qu’ils n’ont pas favorisé chez eux le développement de l’expertise médicale nationale.
Ces chefs d’Etat, qui ne se gênent pas pour aller se soigner à l’étranger, n’ont pas non plus érigé l’acquisition du matériel médical en priorité de leurs actions. En 2017, il est encore impossible, faute d’appareils, de pratiquer une IRM dans certains Etats d’Afrique subsaharienne. Dans d’autres, il existe un seul appareil qui tombe régulièrement en panne, pour cause de surchauffe ou de défaut de maintenance.
Enfin, les chefs dilapident sans compter, les deniers de l’Etat. Mais se soigner à l’étranger est également une énorme injustice envers le reste de la Nation. En effet, pendant que leurs compatriotes sont condamnés à se rendre dans des structures de santé devenues des mouroirs, les présidents africains eux prélèvent sans vergogne sur les deniers publics pour aller recevoir des soins en Occident. Et c’est souvent une affaire de gros sous : la facture d’hospitalisation d’un dirigeant sahélien à l’Hôpital américain de Neuilly a grimpé jusqu’à 300 000 euros (180 000 000 FCFA), soit le budget de fonctionnement annuel de l’Hôpital de Birao, en Centrafrique écrit Seidik Abba, Chroniqueur au journal  Le Monde Afrique. De même, l’aller-retour d’un avion médicalisé pour acheminer à Paris un ministre africain malade coûte 120 000 euros (72 000 000 FCFA), l’équivalent d’une vingtaine de bourses d’études en médecine à Dakar. La faute politique et l’injustice expliquent ensemble la colère d’une partie de l’opinion africaine.
Pour avoir fait le choix de négliger les structures sanitaires de leur pays, convaincus qu’ils pourront toujours être évacués vers les capitales occidentales, les dirigeants africains ont mis le continent au sommet du palmarès mondial des présidents décédés à l’étranger. On peut citer: le Zambien Michael Sata, décédé en 2014 à Londres, l’Ethiopien Melès Zenawi, mort en 2012 à Bruxelles, le Bissau-Guinéen Mallam Bacai Sanha qui s’est éteint la même année à Paris tout comme le Zambien Levy Mwanassa mort en 2008 à Paris.
Le Nigérian Umaru Yar’Adua, se sentant condamné, est quant à lui rentré d’Arabie saoudite en 2010, juste à temps pour mourir parmi les siens.
De toute cette liste, les deux cas les plus scandaleux sont ceux du Gabonais Omar Bongo Ondimba et du Togolais Eyadema Gnassingbé. Le premier est mort en 2009 à Barcelone, en Espagne, après avoir dirigé son pays pendant quarante-deux ans sans avoir eu à cœur de bâtir un centre sanitaire dans lequel il rendrait son dernier souffle.
Le second est mort en 2005 dans l’avion qui le transportait de Lomé vers une capitale occidentale après trente-huit ans d’un règne au cours duquel il avait eu les moyens suffisants de doter le Togo d’un centre hospitalier qui lui aurait permis de recevoir les premiers soins avant son évacuation. Cela lui aurait peut-être sauvé la vie !
Plus de dix ans plus tard, les chefs d’Etat africains ne semblent pas avoir tiré les enseignements de l’erreur fatale d’Eyadema Gnassingbé. Hélas, ils continueront donc de mourir hors des frontières nationales à l’exemple d’Etienne Tshisekedi wa mulumba, le leader charismatique de l’opposition Congolaise qui vient de mourir à Bruxelles.

PETIT-LAMBERT OVONO
Consultant Sénior
Evaluateur Certifié Interuniversitaire



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire